La CSI, la Campagne Vêtements Propres (Clean Clothes Campaign, CCC) et l’HEC-NYU EU Public Interest Clinic ont aujourd’hui présenté une plainte formelle au Médiateur européen. Les organisations des droits des travailleurs estiment que la Commission européenne ne tient pas compte de ses obligations en matière de droits humains dans le cadre de ses politiques commerciales vis-à-vis du Bangladesh, et lui reprochent son manque de transparence à cet égard.
Le Bangladesh bénéficie d’un régime de tarifs préférentiels dans ses exportations vers l’Europe, en vertu du Système des préférences généralisées (SPG), un instrument de l’UE promulgué pour encourager un développement durable dans les pays bénéficiaires. Le SPG exige, en contrepartie, des pays bénéficiaires qu’ils maintiennent un ensemble de normes du travail et qu’ils respectent les droits des travailleurs. De par son appartenance à la catégorie des pays les moins avancés, selon la nomenclature onusienne, le Bangladesh bénéficie du régime le plus favorable sous le SPG, à savoir l’initiative « Tout sauf les armes » (TSA). Comme son nom l’indique, l’initiative TSA octroie un accès en franchise de droits et de quotas au marché unique européen pour tous les produits d’exportation à l’exception des armes et des munitions. Le Bangladesh est le principal bénéficiaire de la TSA et l’UE, le principal partenaire commercial du Bangladesh. L’industrie du prêt-à-porter représente une large majorité des exportations du Bangladesh et procure de l’emploi à quatre millions de travailleurs.
Le Bangladesh est coupable de violations graves et systématiques des droits fondamentaux des travailleurs. Des millions de travailleuses et travailleuses au Bangladesh sont astreints à des conditions de travail dangereuses. Qui plus est, la législation du travail du Bangladesh créé des obstacles considérables pour l’exercice du droit de liberté syndicale, du droit d’organisation et du droit de négociation collective. Sans compter que même ces lois biaisées ne sont pas adéquatement mises en œuvre par le gouvernement, tandis que les plaintes des travailleurs sont systématiquement ignorées par les autorités. Privés de pouvoir de négociation ou de recours légal, les travailleurs sont contraints de vivre dans une pauvreté extrême.
Bien qu’elle ait exhorté le Bangladesh d’améliorer ses conditions de travail, la Commission européenne s’est abstenue de lancer une enquête formelle sur le statut SPG du Bangladesh, et ce alors que le SPG fournirait à la Commission un outil extrêmement puissant à l’heure d’assurer que le développement économique ne se fasse pas au détriment des travailleurs. La Commission a aussi manqué de créer un processus transparent et objectif permettant de déterminer le moment le plus propice pour l’ouverture d’une enquête, rendant par-là même impossible la participation d’ONG, entre autres.
« Le gouvernement du Bangladesh doit défendre les travailleurs et pas seulement se plier aux exigences des puissants patrons d’usines, dont un grand nombre sont responsables d’une exploitation débridée. Cette plainte a pour but d’amener l’Union européenne à envoyer un message très clair au Bangladesh, conformément aux engagements auxquels l’UE, elle-même, a souscrit. Nous œuvrons en collaboration étroite avec la CES sur cette problématique et tenons à la remercier pour son soutien », a indiqué Sharan Burrow, secrétaire générale de la CSI.
« En tant que principale partenaire commerciale du Bangladesh, l’UE a pour responsabilité de veiller à ce que les travailleurs qui confectionnent les vêtements des Européens travaillent dans des usines sécurisées. L’ouverture d’une enquête n’entraînera pas la révocation automatique des privilèges commerciaux du Bangladesh – plutôt, cela doit servir à montrer que l’Europe est déterminée à faire respecter les normes du travail d’une manière à la fois équitable et systématique », a indiqué Paige Morrow, directrice exécutive de l’HEC-NYU EU Public Interest Clinic.